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Page:Loti - Jérusalem, 1895.djvu/44

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neaux sarrasins, flanqué, sur ces quatre angles, de lourdes tours également crénelées. Sous le pâle soleil de midi, qui perce à peine le gris lilas des brumes, deux de ses faces sont rosées et les deux autres bleuâtres, — celles de l’ombre. Ses farouches créneaux alignent leurs séries de pointes sur le ciel. Coupée de brèches et de lézardes, seule, triste, immense et haute dans ce pays dénudé, elle est une citadelle du grand Saladin, édifiée là bien des siècles après la destruction des palais de l’Ecclésiaste, et aujourd’hui, débris à son tour. Un petit Arabe, tout enfant, perché sur un dromadaire, qui sort de cette forteresse par une monumentale ogive, nous adresse un salam respectueux, comme à des cheiks moghrabis, — et nous prenons place, avec nos chevaux, à la grande ombre des murs.

Deux autres groupes viennent bientôt s’asseoir à la même ombre, s’espaçant dans la longueur des formidables murailles : quatre prêtres grecs, en tournée d’archéologie, qui font sur l’herbe un petit déjeuner frugal, et quelques femmes maronites, descendues de Bethléem avec des enfants, qui ont apporté des narguilés et des oranges.

Quel terne et singulier soleil, aujourd’hui, dans ce ciel d’Orient, et comme ce lieu est mélancolique.