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Page:Loti - Jérusalem, 1895.djvu/53

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à elles seules dénonçant la Judée. Sous nos pieds, un grand panorama, qui d’abord descend en profondeur, puis qui, dans les lointains, remonte très haut par plans de montagnes étagées ; toute une campagne paisible, mélancolique, d’oliviers et de pierres, de pierres surtout, de pierres grises dont les pâles nuances semblent vaporeuses dès que tombe le jour. Et, dominant tout, à d’inappréciables distances, la grande ligne bleuâtre des montagnes du Moab, qui sont sur l’autre rive de la mer Morte.

On entend partout sonner des clochettes de troupeaux qui reviennent des champs et, au loin, des cloches de monastères…

Ils arrivent, les troupeaux ; ils commencent à passer devant nous avec leurs bergers, et c’est un défilé presque biblique, qui se prolonge là sous nos yeux, dans une lumière de plus en plus atténuée.

Très imprévus, passent aussi une cinquantaine d’enfants qui dansent, en chantant cette vieille chanson de France : « Au clair de la lune… prête-moi ta plume… » L’école chrétienne, qui revient d’une promenade ; une cinquantaine de petits Arabes convertis, habillés à la mode d’Europe. Les Frères qui les conduisent chantent le même air et le dansent aussi ; c’est étrange, mais c’est innocent et c’est joyeux.