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Page:Loti - La Galilée, 1896.djvu/13

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que le vent balaye et où la pluie ruisselle ; le soir, nous aurons pour gîte, en un point quelconque du sombre pays, ces tentes déjà trempées d’eau, que des mules, derrière nous, charrient péniblement, en glissant dans la boue à chaque pas. Des orges et des pierres, à perte de vue il n’y a rien d’autre, et pas un abri. Les impressions des dernières heures de Jérusalem, les navrantes et les douces, se dispersent et s’éteignent dans l’espace vide, dans le froid, dans la mouillure, dans le coup de fouet continuel des rafales. Nous ne sommes plus que des errants quelconques, en lutte physique contre un temps d’hiver, et, par moments, contre nos chevaux qui tournent le dos à l’ondée cinglante, refusant d’avancer. — Sinistre départ qui nous donne l’envie de rebrousser chemin. Après quatre heures d’étape, halte au hameau perdu qui s’appelle Béïtine. Il vente tempête. Un Arabe hospitalier nous offre comme refuge la maison, le cube de pierre tout noirci de fumée qu’il habite avec ses petits. Transis, nous nous séchons là devant un grand feu de branches, qui nous enfume à nous faire pleurer. Dans le désert rocheux qui nous environne, les rafales sifflent, la pluie s’abat, furieuse.