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Page:Loti - La Galilée, 1896.djvu/168

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précis, tel qu’aux époques d’Aladin ou des Trois Dames de Bagdad. Devant nous, qui avons pris place un moment parmi les rêveurs, passe une petite fille arabe, de cinq ou six ans, seule, l’air comiquement grave, marchant avec des socques aux talons très élevés. Tout à coup, de trop regarder voler les hirondelles, voici qu’elle trébuche, perd une de ses hautes chaussures et tombe contre le pavé — en plein sur son petit nez. Sans rien dire, elle se relève, toute sanglante, et se rechausse — enfant du peuple, déjà habituée aux détresses solitaires ; personne ne s’occupe de son malheur et elle ne s’en étonne pas. Cependant le sang coule toujours de son pauvre petit nez ; chaque fois qu’elle y porte la main, ses doigts deviennent rouges et elle les secoue sur le pavé ; alors tout de même une expression d’angoisse contracte sa figure, les larmes viennent ; elle pleure silencieusement — et s’en va, très raisonnable, à l’exquise fontaine, pour se laver toute seule à l’eau fraîche. Comme diversion, nous lui donnons des pièces blanches. Elle les serre dans sa poche en disant merci, et pleure toujours, et continue de saigner beaucoup. Survient un petit garçon arabe de sept ou huit ans,