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Page:Loti - Les Désenchantées, 1908.djvu/154

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XI

Le lendemain, elle avait écrit à André :

« S’il fait beau jeudi, voulez-vous que nous nous rencontrions à Eyoub ? Vers deux heures, en caïque, nous arriverons aux degrés qui descendent dans l’eau, juste au bout de l’avenue pavée de marbre qui mène à la mosquée. Du petit café qui est là, vous pourrez nous voir débarquer, et, n’est-ce pas, vous reconnaîtrez bien vos nouvelles amies, les trois pauvres petits fantômes noirs de l’autre jour ? Puisque vous portez volontiers le fez, mettez-le, ce sera toujours moins dangereux. Nous irons droit à la mosquée, où nous entrerons un moment. Vous nous aurez attendues dans la cour. Alors, marchez, nous vous suivrons. Vous connaissez Eyoub mieux que nous-mêmes ; trouvez-y un coin (peut-être sur les hauteurs du cimetière) où nous pourrons causer en paix. »

Et il faisait très beau, ce jeudi-là, sous un ciel de haute mélancolie bleue. Il faisait chaud tout à coup, après ce long hiver, et les senteurs d’Orient, qui avaient dormi dans le froid, s’étaient partout réveillées.