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Page:Loti - Les Désenchantées, 1908.djvu/242

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Le surlendemain elles répondirent :

"Que vous nous ayez identifiées, est un malheur : ces amies dont vous ne connaîtrez jamais le visage, vous intéressent-elles encore, maintenant que leur petit mystère est usé, percé à jour ?…

La suite de mon histoire : cela, rien de plus facile, vous l’aurez.

Nous revoir, André, c’est moins simple : laissez-moi réfléchir… DJÉNANE."

"Eh bien ! moi, je vais m’identifier à fond, en vous apprenant où est notre demeure. Quand vous descendez le Bosphore, côté d’Asie, dans la seconde crique après Tchiboukli, il y a une mosquée ; après la mosquée, un grand yali très vieux style, très grillagé, pompeux et triste, avec toujours quelque aimable nègre en redingote qui rôde sur le quai étroit : c’est chez nous. Au premier étage, qui s’avance en encorbellement sur la mer, les six fenêtres de gauche, défendues par de farouches quadrillages, sont celles de nos chambres. Puisque vous aimez cette côte d’Asie, passez là de préférence et regardez à ces fenêtres, sans regarder trop : vos amies, qui reconnaîtront de loin votre caïque, montreront le bout de leur doigt par un trou, en signe d’amitié, ou bien le coin de leur mouchoir.

Ça s’arrange avec Djénane, et comptez sur une entrevue à Stamboul pour la semaine prochaine. MÉLEK."

Il ne se fit point prier pour « passer là ». Le lendemain précisément se trouvait être un vendredi, jour de promenade élégante aux Eaux-Douces d’As