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Page:Loti - Les Désenchantées, 1908.djvu/28

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"Bonne mademoiselle, mignonne mademoiselle, ne vous fâchez pas de ma fantaisie : je voudrais être toute seule pour la lire.

— Décidément, en fait de drôle de petite créature, il n’y a pas plus drôle que vous, ma chérie !… Mais vous me la laisserez voir après, tout de même ? C’est le moins que je mérite, il me semble !… Allons, soit ! Je vais aller ôter mon chapeau, ma voilette, et je reviens…"

Très drôle de petite créature en effet, et, de plus, étrangement timorée, car il lui parut maintenant que les convenances l’obligeaient à se lever, à se vêtir et à se couvrir les cheveux, avant de décacheter, pour la première fois de sa vie, une lettre d’homme. Ayant donc passé bien vite une « matinée » bleu pastel, venue de la rue de la Paix, de chez le bon faiseur, puis ayant enveloppé sa tête blonde d’un voile en gaze, brodé jadis en Circassie, elle brisa ce cachet, toute tremblante.

Très courte, la lettre ; une dizaine de lignes toutes simples, —avec un passage imprévu qui la fit sourire, malgré sa déconvenue de ne trouver rien de plus confiant ni de plus profond, —une réponse courtoise et gentille, un remerciement où se laissait entrevoir un peu de lassitude, et voilà tout. Mais quand même, la signature était là, bien lisible, bien réelle : André Lhéry. Ce nom, écrit par cette main, causait à la