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Page:Loti - Les Désenchantées, 1908.djvu/382

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— Oh ! moi, répondit-elle, avec cette indifférence un peu hautaine qui lui était venue depuis quelques jours, moi, il est question de me redonner à Hamdi…

— Et alors, qu’est-ce que vous ferez ?

— Mon Dieu, que voulez-vous que je fasse ! Il est probable que je me soumettrai. Puisqu’il en faut un, n’est-ce pas, autant subir celui-là qui a déjà été mon mari ; la honte me semblera moindre qu’auprès d’un inconnu…"

André l’entendit avec stupeur. L’épais voile noir l’empêchait du reste de lire dans ses yeux ce qu’il y avait de sincère ou non, sous cette résignation soudaine. Ce consentement inespéré à un retour vers Hamdi, c’était ce qu’il pouvait souhaiter de meilleur, pour trancher une situation inextricable ; mais d’abord il y croyait à peine, et puis il s’apercevait que ce serait plutôt un dénouement pour le faire souffrir.

Ils ne dirent plus rien sur ces sujets qui brûlaient, et un silence plein de pensées s’ensuivit. Ce fut la voix douce de Djénane qui après s’éleva la première, dans ce lieu, si calme que l’on entendait l’une après l’autre tomber chaque feuille. Sur un ton bien détaché, bien tranquille, elle reparla du livre :

"Ah ! dit-il en essayant de n’être plus sérieux, c’est vrai, le livre ! Depuis des temps, nous n’y pensions plus… Voyons, qu’est-ce que je vais raconter ? Que vous voulez aller dans le monde le soir, et porter le