LXVI
Au fond de l’arsenal de Brest, un peu avant le jour, le premier matin de l’année 1881, — un lieu triste, ce fond de port ; la Sèvre y était amarrée depuis une semaine.
En haut, le ciel avait commencé à blanchir entre les grandes murailles de granit qui nous enfermaient. Les réverbères, très rares, donnaient dans la brume leur dernière petite lumière jaune. Et on voyait déjà des silhouettes de choses formidables qui se dessinaient, éveillant des idées de rigidité méchante ; des machines haut perchées, des ancres énormes dressant leurs pattes noires ; toute sorte de formes indécises et laides, et puis des navires désarmés, avec leurs gigantesques tournures de poisson, immobiles sur leurs chaînes, comme de gros monstres morts.
Un grand silence dans ce port, et un froid mortel…
Il n’y a pas de solitude comparable à celle des