Page:Loti - Pêcheur d Islande.djvu/229

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de quelque énorme bête morte effondrée sous ses poils durs. Ses murailles avaient la couleur sombre et la rudesse des rochers, avec des mousses et du cochléaria formant de petites touffes vertes. On montait les trois marches gondolées du seuil, et on ouvrait le loquet intérieur de la porte au moyen d’un bout de corde de navire qui sortait par un trou. En entrant, on voyait d’abord en face de soi la lucarne, percée comme dans l’épaisseur d’un rempart, et donnant sur la mer d’où venait une dernière clarté jaune pâle. Dans la grande cheminée flambaient des brindilles odorantes de pin et de hêtre, que la vieille Yvonne ramassait dans ses promenades le long des chemins ; elle-même était là assise, surveillant leur petit souper ; dans son intérieur, elle portait un serre-tête seulement, pour ménager ses coiffes ; son profil, encore joli, se découpait sur la lueur rouge de son feu. Elle levait vers Gaud ses yeux jadis bruns, qui avaient pris une couleur passée, tournée au bleuâtre, et qui étaient troublés, incertains, égarés de vieillesse. Elle disait toutes les fois la même chose :

— Ah ! mon Dieu, ma bonne fille, comme tu rentres tard ce soir…