Page:Louÿs - Œuvres complètes, éd. Slatkine Reprints, 1929 - 1931, tome 7.djvu/127

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disant tout, luttes, refus, prières, et la résistance chrétienne de l’enfant, lequel ne peut toutefois commander à son corps et finit par être surmonté. Pendant quinze jours elle le garde à elle, moins hostile mais de plus en plus tourmenté par le remords, et enfin la première confession du petit le lui arrache pour jamais. Plus elle le prie, plus il s’obstine, s’enferme à clef, menace de tout dire. Alors, messieurs, elle l’empoisonne… Instruite par un procédé qu’elle trouve dans un feuilleton populaire, elle se procure un poison lent, sans traces ni douleurs, mais qui tue peu à peu. Elle voit sa victime dépérir et s’éteindre sous ses yeux qui ne lui pardonnent point. Chaque jour elle lui laisse mentalement à choisir entre le crime et le tombeau, sans démasquer la main qui soulève la pierre et enfin la laisse retomber.

L’œil du prêtre nous parcourut avec un éclair tragique, resta quelque temps allumé d’horreur et, nous regardant toujours en face, prit un sourire de franche gaieté.

Pour nous, en écoutant cette histoire, nous avions oublié jusqu’au bout qu’il s’agissait d’une confession suspecte. Le ton du narrateur était si formellement affirmatif que nous avions perdu de vue l’occasion, l’objet du récit.

— Qu’y a-t-il de vrai dans tout cela ? demanda quelqu’un.

— Pas un mot. Rien, mais rien, pas une scène,