Page:Louÿs - Œuvres complètes, éd. Slatkine Reprints, 1929 - 1931, tome 7.djvu/40

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son corps. Elle se retournait souvent pour nous voir ; et je m’aperçus alors qu’en s’habillant soudain elle avait revêtu presque une âme nouvelle. Son visage s’était métamorphosé. Elle nous observait avec inquiétude, comme si elle avait cherché à savoir lequel de tous ces hommes allait lui faire outrage, et, oubliant déjà dans quelle nudité nous avions connu sa personne, elle repoussait son voile plissé avec ce joli mouvement du coude gauche en arrière qui veut dissimuler le globe de la croupe.

Déjà nous avions parcouru la moitié de la rue principale, quand Parrhasios s’arrêta.

— Non, me dit-il, ce que je cherche n’est pas ici. La jeunesse du corps et la beauté du front ne se rencontrent point ensemble. Aussi bien Prométhée n’est-il pas un éphèbe. Coupons court vers la droite ; suivons au hasard : j’ai plus de chances de trouver mon homme parmi les esclaves de second prix.

À peine avions-nous fait trois pas dans la deuxième allée à droite, il étendit les mains et cria :

— Le voici !

Je m’approchai avec curiosité.

L’homme qu’il me désignait ainsi touchait à la cinquantaine. De très haute taille et de proportions excellentes, il avait le front large, l’arcade sourcilière puissante et musclée, le nez robuste et géométrique, les narines épanouies, les oreilles profondes. Ses cheveux étaient gris, sa barbe