Page:Louÿs - Œuvres complètes, éd. Slatkine Reprints, 1929 - 1931, tome 9.djvu/244

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

désirs l’objet d’une flamme future ; je l’embrassais dans les vents, je croyais l’entendre dans les gémissements du fleuve ; tout était ce fantôme imaginaire, et les astres dans les cieux, et le principe même de vie dans l’univers[1]. »

C’est bien vieilli, vallée, montagne, flamme, quel attrait ! Mais au fond c’est très vrai.

Et plus loin :

« Ah ! si j’avais pu faire partager à une autre les transports que j’éprouvais. Ô Dieu ! si tu m’avais donné une femme selon mes désirs ; si, comme à notre premier père, tu m’eusses amené par la main une Ève tirée de moi-même. Beauté céleste, je me serais prosterné devant toi, puis, la prenant dans mes bras, j’aurais prié l’Éternel de te donner le reste de ma vie. »

Qu’est-ce que j’écrivais hier soir même ? : « Je voudrais être marié avec une femme qui me comprît pour lui dire tout, tout… »

Cette première partie a donc de bons passages. Je dis cela parce qu’ils répondent à mes idées. Mais la suite ? Qu’est-ce que cela veut dire, cet amour de la sœur ? Pourquoi faire ? À quoi ça rime-t-il ? Ce n’est pas la conséquence de sa rêverie ! Il n’aurait pas rêvé, il aurait été sous-chef adjoint dans un ministère, qu’elle l’aurait aimé tout autant.

  1. Quelle admirable, quelle inimitable page ! et je ne la comprenais pas ! (Déc. 97.)