Page:Louÿs - Les aventures du roi Pausole, 1901.djvu/356

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compris tout de suite que j’étais gentille avec eux et que je n’avais pas de raisons pour être mauvaise avec les autres. Tout le monde me trouve jolie dans le quartier. Je ne dis pas que tout le monde me plaît, mais que voulez-vous ? chacun pratique la charité comme il l’entend. On n’est pas riche à la maison, je donne ce que j’ai, j’aime faire plaisir, et le soir je m’endors contente quand je me dis que j’ai eu bon cœur pour tous ceux qui me tendaient la main. C’est ma petite vertu, à moi.

Pausole demeurait rêveur.

— Je n’aurais rien à dire, fit-il, si tu ne t’étais pas mariée. Le mariage est une abdication volontaire de la liberté. On peut la révoquer, cette abdication mais alors il faut se séparer.

— Oh ! nous n’en voyons pas si long ! Je me suis mariée avec les marmitons de mes parents. Ils tiennent la maison. Moi, je fais le ménage. C’est notre intérêt de rester ensemble, et, comme nous nous aimons bien, tout s’arrange. Quand la nuit est passée, quand le ménage est fini, je reste seule et je n’ai rien à faire. Mes maris sont à leur travail. Alors, comme tant d’autres, je pourrais aller de porte en porte causer avec les commères et dire du mal des voisins. Moi, je