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Il tenait les deux mains de Line, qui ne baissait pas les paupières et qui laissait entr’ouverte, comme pour un baiser toujours prêt, sa petite bouche plus haute que large de jeune fille encore enfant.


Il ne lui parlait point. Il n’aurait su que lui dire. Vaguement, et une à une, les phrases qu’il avait répétées cent fois se présentèrent à son esprit. D’abord il les rejeta, puis avec un sourire presque triste, il pensa que, sur un autre ton, ces phrases-là ne seraient plus les mêmes. Il se dit que ses hyperboles, et les plus invraisemblables, se trouveraient mieux que jamais en situation ; que les petits mensonges de la galanterie, excusables dans une aventure, deviendraient tout à fait touchants au début d’une passion réelle ; enfin qu’il pouvait sans faute abuser sa nouvelle amie selon ses méthodes, ordinaires, sachant qu’il lui ferait plaisir et sentant combien cela lui était dû.

— Qu’avez-vous ? disait Line.

— Je vous aime, fit-il.

— Je vous aime aussi, Djilio je vous aime de tout mon cœur. Je suis bien heureuse en vous le disant.

— Mais moi, je vous aime depuis si longtemps. Vous n’en saviez rien, n’est-ce pas ?