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de ma lecture rafraîchissante, j’attirai Lili dans mes bras, et je me mis à bavarder, parmi quelques attouchements que nous qualifierons d’outrage à la pudeur commis sans violence.

« Lili, tu es une très jolie gosse, lui dis-je.

— C’est pas vrai. Quand je me branle devant la glace, je ne m’excite pas. »

Cette phrase me fit rire aux éclats.

Lili resta sérieuse ; et comme il est aisé de séduire les enfants, elle affirma sans préambule, sans raison, mais d’un air pénétré :

« Je vous aime bien.

— Oh ! alors, ma petite Lili, tu as deux idées dans la tête.

— Pourquoi deux ?… Oui, c’est vrai, j’en ai deux. Comment savez-vous ça ? Votre doigt vous l’a dit ?

— Justement. Les idées que les filles ont dans la tête…

— Ça leur vient du con ? » fit Lili.

Il m’est difficile de cacher maintenant où flânait le doigt qui me disait tant de choses.

« Si tu en sais tant ! répondis-je. Mais tu ne sais pas pourquoi tu as deux idées ? C’est que, quand on aime bien quelqu’un on veut de tout son cœur un plaisir pour lui et un de sa part. »

Elle eut un instant de réflexion : le temps de comprendre une maxime. Puis elle sourit et se fourra la figure sous la mienne pour répondre :

« Vous ne la trouvez pas trop petite, ma moniche d’un sou ? Vous voulez bien me baiser quand même ?

— Tu es de plus en plus gentille, ma Lili. La