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l’adolescence féminine qu’ils ne sauraient comprendre comment une jeune fille peut avouer son goût de se branler quand on l’encule et n’avoir aucun sens du vice. Les jeunes filles me comprendront mieux et cela me console, car il est évident que ce livre sera lu par les jeunes filles plus souvent que par les maris.

Donc, Charlotte n’avait aucun sens du vice, heureusement pour elle et pour moi ; mais elle était « sensible », comme disaient les auteurs du dix-huitième siècle. Et, sans cris ni soupirs ni trémoussements de la croupe, elle se mit à baver si abondamment que la petite Lili (vicieuse, celle-là) eût trempé trois biscuits dans cette flûte mousseuse. Cela débordait sur la vulve et cela passait par-dessus les poils… Je me retirai à temps. Ce que je venais de voir m’avait consolé de ne pas posséder Charlotte par la voie inondée.

Quand nous nous retrouvâmes côte à côte, un nouvel incident nous arrêta. Charlotte ne voulait rien choisir, ni proposer. Elle n’avait ni goût, ni caprice, ni préférence, ni invention. Imaginer ou décider, cela la fatiguait.

« Pourvu que tu m’encules et que je me branle, dit-elle, je serai contente.

— Alors mets-toi la tête par terre et les deux cuisses sur le lit.

— Si tu veux ! » fit-elle simplement.

Puis, dès qu’elle eut compris que ce n’était pas sérieux, elle prit mon visage entre ses belles mains et me dit avec un sourire, sans amertume :