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Page:Louis-d-elmont-l-inceste royal-1925.djvu/8

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n’a rien de despotique et une sage administration lui a conquis une popularité dont aucun souverain n’a put se prévaloir avant lui.

Il y a une autre raison pour laquelle on acclame joyeusement le jeune souverain ; c’est qu’il est le prince le plus gracieux et le plus aimable qui soit. Déjà les filles nobles sentent leur cœur battre en sa présence et plus d’une se demande s’il ne jettera pas sur elle son dévolu.

Le duc de Boulimie cependant ne doute pas que sa fille ne soit l’élue du roi. La princesse Séraphine, en effet, est une beauté accomplie, et tous admirent ses yeux bleus d’azur, ses cheveux couleur de soleil, son visage à l’ovale régulier, sa bouche mignonne, son corps souple et harmonieux, la grâce et la distinction de toute sa personne. Sa mère Sigeberte elle-méme reconnaît qu’elle ne fut jamais aussi belle que sa fille. Et pourtant, même encore à présent, la duchesse de Boulimie compte parmi les plus jolies femmes de Sigourie.

Le roi venant d’atteindre sa vingtième année, on a hâte d’apprendre son prochain mariage, car il faut bien, n’est-ce pas, que la dynastie se perpétue.

Benoni XIV cependant n’a pas encore laissé deviner ses intentions.

De puissants souverains étrangers ont chargé leurs ambassadeurs de sonder le terrain, et de poser adroitement la candidature de leurs filles, mais ces ambassadeurs n’ont jusqu’alors obtenu aucun encouragement, et n’ont pu transmettre à leurs maîtres aucun indice, si petit fût-il, leur permettant de fonder le moindre espoir.

Ils sont d’ailleurs convaincus, les uns et les autres, que le roi finalement épousera sa cousine Séraphine. Presque tous les Sigouriens en sont également convaincus… presque tous, sauf le comte de Vergenler, qui est toujours le précepteur militaire du souverain, lequel lui a conféré le plus haut grade de son armée, qui est celui de grand sénéchal, avec le commandement de toutes les troupes du royaume.

Lorsqu’on parle du mariage de Benoni XIV avec la fille du duc de Boulimie, le grand sénéchal a un sourire entendu et il ne manque pas de dire :

— Il n’y a pas de plus jolie femme que la princesse Séraphine, mais ce n’est pas une raison pour qu’elle devienne notre reine, et que le roi en soit amoureux. D’ailleurs, rien ne presse… rien ne presse…

Pourtant le comte de Vergenler n’a pas de fille. Par conséquent il ne peut espérer pour sa maison l’honneur d’un mariage royal, Alors, pourquoi ne veut-il pas que son souverain épouse sa cousine ? Serait-ce parce que le duc de Boulimie lui a toujours témoigné une réserve et une froideur qui