Page:Louis - Le Colonialisme, 1905.djvu/105

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travail. Comment, en se plaçant à ce point de vue déjà, le prolétariat pourrait-il trouver quelque avantage à souscrire à un système, qui le ruine et qui l’écrase, qui augmente la précarité de son sort, l’instabilité de son emploi, et qui, à la fois, le frustre de ses dernières ressources ?

Mais ce n’est point tout encore. Par l’impulsion nouvelle qu’il imprime à la guerre économique mondiale, le colonialisme contribue à disloquer la classe possédante, à atténuer ses effectifs, et à accroître celui des prolétaires.

La bourgeoisie industrielle, la petite et la moyenne propriété rurales, sont cruellement atteintes, elles aussi, par l’éveil des contrées neuves à la production manufacturière et agricole. La filature britannique, après s’être enrichie des dépouilles de l’Inde, appréhende une faillite, que provoquerait la filature de Bombay et de Calcutta. La transformation textile a progressé, autour de ces deux grandes villes, avec une vertigineuse célérité. Les tarifs douaniers, si légers soient-ils, qu’a institués le gouvernement anglo-indien pour protéger les cotonnades indigènes, ont suscité outre Manche la colère et l’effroi. La puissante industrie française des Vosges et de la Seine-Inférieure prévoit déjà l’apparition d’usines rivales sur la côte de Guinée et dans l’Indo-Chine, tandis que les propriétaires de nos départements du Midi dénoncent la poussée viticole de l’Algérie et de la Tunisie, et que nos agriculteurs et nos éleveurs du Centre et du Nord font une guerre acharnée à certaines importations de notre em-