Page:Louis Napoléon Bonaparte - Histoire de Jules César, tome 1, Plon 1865.djvu/280

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où perçait plus de haine que de vérité, comme dit Cicéron lui-même, magis odio firmata quam præsidio[1], ne furent répandus par ses adversaires que bien plus tard, c’est-à-dire à une de ces époques d’effervescence où les partis politiques, pour se décrier mutuellement, ne reculent devant aucune calomnie[2]. Malgré le relâchement des mœurs, rien n’était plus capable de nuire à la réputation de César que cette accusation, car une semblable impudicité non-seulement était frappée de réprobation dans les rangs de l’armée[3], mais, commise avec un étranger, elle eût été l’oubli le plus dégradant de la dignité romaine. Aussi César, que son amour pour les femmes devait mettre à l’abri d’un pareil soupçon, le repoussait-il avec une juste indignation[4].

Après avoir fait ses premières armes au siège de Mitylène, César servit sur la flotte du proconsul P. Servilius (676), chargé de faire la guerre aux pirates ciliciens, et qui reçut plus tard le surnom d’Isauricus pour s’être emparé d’Isaura, leur principal repaire[5], et avoir fait la conquête d’une partie de la Cilicie. Cependant il resta peu de temps avec Servilius, et, ayant appris la mort de Sylla, il retourna à Rome[6].


  1. Cicéron, Lettres à Atticus, II, xix.
  2. Ces bruits, comme d’autres calomnies, furent propagés par les ennemis de César, tels que Curion et Bibulus, et répétés dans les annales ridicules de Tanusius Geminus (Suétone, César, ix), dont Sénèque infirmait l’autorité. « Tu sais que l’on ne fait pas cas de ces annales de Tanusius et comment on les appelle. » (Sénèque, Épître 93.) Catulle (xxxvi, I) nous donne ce terme de mépris, auquel Sénèque fait allusion (cacata charta).
  3. « Marius avait dans son armée un neveu nommé Caius Lucius, qui, épris d’une passion honteuse pour un de ses subordonnés, se porta sur lui à un acte de violence. Celui-ci tira son épée et le tua. Cité devant le tribunal de Marius, au lieu d’être puni, il fut comblé d’éloges par le consul, qui lui donna une de ces couronnes récompense ordinaire du courage. » (Plutarque, Marius, xv.)
  4. « César n’était pas fâché qu’on l’accusât d’avoir aimé Cléopâtre, mais il ne pouvait souffrir qu’on publiât qu’il avait été aimé de Nicomède. Il jurait que c’était une calomnie. » (Xiphilin, Jules César, p. 30, édit. Paris, 1678.)
  5. Orose, V, xxiii.
  6. Suétone, César, iii.