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Page:Louis Napoléon Bonaparte - Histoire de Jules César, tome 1, Plon 1865.djvu/355

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comme le dit Dion-Cassius, le changement de la constitution de la République et le soulèvement des alliés[1]. Son succès néanmoins eût été un malheur ; un bien durable ne peut jamais sortir de mains impures[2].


Erreur de Cicéron.

VI. Cicéron croyait avoir détruit tout un parti, il se trompait : il n’avait fait que déjouer une conspiration et dégager une grande cause des imprudents qui la compromettaient ; la mort illégale des conjurés réhabilita leur mémoire, et on trouva un jour le tombeau de Catilina couvert de fleurs[3]. On peut légitimement violer la légalité, lorsque, la société courant à sa perte, un remède héroïque est indispensable pour la sauver, et que le gouvernement, soutenu par la masse de la nation, se fait le représentant de ses intérêts et de ses désirs. Mais, au contraire, lorsque, dans un pays divisé par les factions, le gouvernement ne représente que l’une d’elles, il doit, pour déjouer un complot, s’attacher au respect le plus scrupuleux de la loi, car alors toute mesure extra-légale paraît inspirée non par un intérêt général, mais par un sentiment égoïste de conservation, et la majorité du public, indifférente ou hostile, est toujours disposée à plaindre l’accusé, quel qu’il soit, et à blâmer la sévérité de la répression.

Cicéron fut enivré de son succès ; la vanité le rendit ridicule[4]. Il se crut aussi grand que Pompée, lui écrivit

  1. Dion-Cassius, XXXVII, x.
  2. L’Empereur Napoléon, dans le Mémorial de Sainte-Hélène, traite aussi de fable cette opinion des historiens qui prétendent que Catilina voulait brûler Rome et la livrer au pillage, pour gouverner ensuite sur des ruines. L’Empereur pensait, dit M. de Las-Cases, que c’était plutôt quelque nouvelle faction, à la façon de Marius et de Sylla, qui, ayant échoué, avait vu accumuler sur son chef toutes les accusations banales qu’on élève en pareil cas.
  3. Cicéron, Discours pour Flaccus, xxxviii.
  4. « Il excita l’animadversion publique, non par une mauvaise action, mais par l’habitude de se vanter lui-même. Il n’allait jamais au sénat, aux assemblées