Page:Louis Napoléon Bonaparte - Histoire de Jules César, tome 1, Plon 1865.djvu/370

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employés à favoriser des passions égoïstes, et non à défendre, comme autrefois, les grands intérêts de la patrie.

Chose digne de remarque ! lorsque le destin pousse une société vers un but, tout y concourt fatalement, autant les attaques et les espérances de ceux qui désirent un changement que la crainte et la résistance de ceux qui voudraient tout arrêter. Après la mort de Sylla, César seul tenta avec persévérance de relever le drapeau de Marius. Dès lors, rien de plus naturel que ses actions et ses discours eussent la même tendance. Mais ce qui doit fixer l’attention, c’est de voir les partisans de la résistance et du système de Sylla, les adversaires de toute innovation, amener à leur insu les événements qui aplanirent à César la voie au pouvoir suprême.

Pompée, le représentant de la cause du sénat, porte le coup le plus sensible à l’ancien régime, par le rétablissement du tribunat. La faveur qui s’attachait à ses prodigieux succès en Orient l’avait élevé au-dessus de tous ; par nature comme par ses antécédents, il penchait du côté de l’aristocratie ; la jalousie des nobles le rejette dans le parti populaire et dans les bras de César.

De son côté le sénat, qui prétend conserver intactes toutes les anciennes institutions, les abandonne en face du danger ; par jalousie envers Pompée, il laisse aux tribuns l’initiative de toutes les lois d’intérêt général ; par crainte de Catilina, il abaisse les barrières qui interdisaient aux hommes nouveaux l’accès au consulat et y fait arriver Cicéron. Dans le procès des complices de Catilina, il viole à la fois et les formes de la justice et la première garantie de la liberté des citoyens, le droit d’appel au peuple. Au lieu de se souvenir que la meilleure politique, dans les circonstances graves, est d’accorder aux hommes importants un témoignage éclatant de reconnaissance pour les services rendus dans la bonne comme dans la mauvaise fortune, au