Page:Louis Napoléon Bonaparte - Histoire de Jules César, tome 2, Plon 1865.djvu/171

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flots, d’y prendre pied et de combattre. Les ennemis, au contraire, libres de leurs membres, connaissant les lieux et postés sur la rive ou peu avant dans la mer, lançaient leurs traits avec assurance et poussaient au milieu des vagues leurs chevaux dociles et bien dressés. Aussi les Romains, déconcertés par cette réunion de circonstances imprévues et étrangers à ce genre de combat, ne s’y portaient pas avec leur ardeur et leur zèle accoutumés.

Dans cette situation, César fit détacher de la ligne des vaisseaux de transport les galères, navires plus légers, d’une forme nouvelle pour les barbares, et les dirigea à force de rames sur le flanc découvert de l’ennemi (c’est-à-dire le côté droit), afin de le chasser de sa position à coups de frondes, de flèches et de traits lancés par les machines. Cette manœuvre fut d’un grand secours ; car les Bretons, frappés de l’aspect des galères, du mouvement des rames et du jeu inconnu des machines, s’arrêtèrent et reculèrent un peu. Cependant les Romains hésitaient encore, à cause de la profondeur de l’eau, à sauter hors des navires, lorsque le porte-drapeau de la 10e légion, invoquant les dieux à haute voix et exhortant ses camarades à défendre l’aigle, s’élance dans la mer et les entraîne après lui[1]. Cet exemple est imité par les légionnaires embarqués sur les bâtiments les plus proches, et le combat s’engage. Il fut opiniâtre. Les Romains ne pouvant garder leurs rangs, ni prendre pied solidement, ni se rallier à leurs enseignes, la confusion était extrême ; tous ceux qui s’élançaient des navires, pour gagner la terre isolément, étaient enveloppés par les cavaliers barbares, auxquels les bas-fonds étaient connus, et, lorsqu’ils se réunissaient en masse, l’ennemi, les prenant par le flanc découvert, les accablait de ses traits. À cette vue, César fit remplir de soldats les chaloupes

  1. L’empereur Julien fait dire à César (p. 70, éd. Lasius) qu’il avait été le premier à sauter en bas du navire.