Page:Louis Napoléon Bonaparte - Histoire de Jules César, tome 2, Plon 1865.djvu/229

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l’événement passé, console, encourage, rejette l’échec sur l’imprudence du lieutenant, et exhorte d’autant plus à la résignation, que, grâce à la valeur des soldats et à la protection des dieux, l’expiation avait été prompte et ne laissait plus de raison aux ennemis de se réjouir, aux Romains de s’affliger[1].

On voit, par ce qui précède, qu’un petit nombre de troupes disséminées sur un vaste territoire surmonta, par la discipline et le courage, une formidable insurrection. Quintus Cicéron, en suivant le principe invoqué par Cotta de ne point entrer en pourparler avec un ennemi en armes, sauva et l’armée, et l’honneur. Quant à César, il montra dans cette circonstance une énergie et une force d’âme que Quintus Cicéron ne manqua pas de faire remarquer à son frère lorsqu’il lui écrivit[2]. Si l’on en croit Suétone et Polyen, César éprouva un si profond chagrin de l’échec subi par Sabinus, qu’en signe de deuil il laissa croître sa barbe et ses cheveux jusqu’à ce qu’il eût vengé ses lieutenants[3], ce qui n’arriva que l’année suivante, par la destruction des Éburons et des Nerviens.


César met ses troupes en quartiers d’hiver. Labienus défait Indutiomare.

XV. Cependant la nouvelle de la victoire de César parvint à Labienus, à travers le pays des Rèmes, avec une incroyable vitesse : ses quartiers d’hiver étaient à soixante milles environ du camp de Cicéron, où César n’était arrivé qu’après la neuvième heure du jour (trois heures de l’après-midi), et pourtant avant minuit des cris de joie s’élevèrent aux portes du camp, acclamations des Rèmes félicitant Labienus. Le bruit s’en répandit dans l’armée des Trévires, et Indutio-

  1. Guerre des Gaules, V, lii.
  2. « J’ai lu avec une vive joie ce que tu me dis du courage et de la force d’âme de César dans cette cruelle épreuve. » (Cicéron, Lettres à Quintus, III, viii, 166).
  3. Suétone, César, lxvii. — Polyen, Stratagèmes, VIII, xxiii, 23.