Page:Louis Napoléon Bonaparte - Histoire de Jules César, tome 2, Plon 1865.djvu/394

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du Hainaut. Il veut châtier ces deux peuples et porter ses armes au delà du Rhin comme au delà de la mer ; qu’on lui laisse donc terminer son ouvrage. Déjà les Alpes sont aplanies ; les barbares, qui ravageaient l’Italie il y a quarante-quatre ans à peine, sont relégués dans leurs déserts et dans leurs forêts. Encore quelques années, et la crainte ou l’espoir, les châtiments ou les récompenses, les armes ou les lois, auront pour jamais rattaché la Gaule à l’Empire[1]. »

Un pareil langage ne pouvait manquer d’être compris par Pompée et par Crassus. On se laisse aisément persuader lorsque l’intérêt public se présente à travers le prisme de l’amour-propre et de l’intérêt personnel. Au delà du consulat, Crassus et Pompée voyaient déjà le gouvernement des provinces et le commandement des armées. Quant à César, la réalisation logique de ses vœux était la prolongation de ses pouvoirs. Une seule difficulté s’opposait à l’exécution de ce plan. L’époque des élections approchait, et ni Pompée ni Crassus ne s’étaient mis en mesure de briguer le consulat dans le délai prévu par la loi ; mais on avait si souvent, depuis nombre d’années, retardé les comices, sous des prétextes frivoles, qu’on pouvait bien aujourd’hui en agir de même dans un intérêt plus sérieux.

César promit d’appuyer leur élection de tout son pouvoir, par ses recommandations et en donnant des congés à ses soldats pour aller voter dans les comices. En effet, ses sol-

  1. Nous avons mis dans la bouche de César les paroles suivantes de Cicéron : « En donnant les Alpes pour bornes à l’Italie, la nature ne l’avait pas fait sans une intention spéciale des dieux. Si l’entrée en eût été ouverte à la férocité et à la multitude des Gaulois, jamais cette ville n’eût été le siège et le centre d’un grand empire. Elles peuvent maintenant s’aplanir, ces hautes montagnes ; il n’est plus rien, des Alpes à l’Océan, qui soit à redouter pour l’Italie. Encore une ou deux campagnes, et la crainte ou l’espoir, les châtiments ou les récompenses, les armes ou les lois, pourront nous assujettir, toute la Gaule et l’attacher à nous par des liens éternels. » (Cicéron, Discours sur les provinces consulaires, xiv.)