Page:Louis Pergaud - Les Rustiques nouvelles villageoises, 1921.djvu/207

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— Toi, mon ami, pensa Jourgeot, tout en souriant aimablement, tu vas un petit peu trop loin, mais rira bien qui rira le dernier.

Cependant, chaque fois qu’on faisait allusion à la chose, le vieux souriait, et, dans sa figure madrée, plissée de rides, creusée de sillons, embroussaillée de poils, ses petits yeux vifs et clignotants brillaient étrangement.

Au fur et à mesure que les jours passaient, la Julie s’arrondissait :

— Elle en met un de baluchon, disaient les commères. Pour sûr qu’elle en va faire deux. Et ce pauvre Jourgeot, qui ne se doute de rien, mais là, de rien ! Jésus ! qu’il y a donc des gens bêtes au monde !

Lui, aimable, souriait toujours, répondait aux plaisanteries par des plaisanteries et s’intéressait activement à la layette du petit.

Enfin, le grand jour arriva.

Au milieu d’un cercle affairé de commères accourues pour donner soi-disant leurs soins à l’accouchée, la sage-femme triomphante brandit un petit être rougeaud, gigotant, qui braillait d’une voix obstinée et sonore.

— Pour de la gueule, il a de la gueule, constata Jourgeot, qui entrait.

— C’est un gros garçon, annonça la sage-femme. Jésus ! comme il ressemble à son papa ! Comme il vous ressemble, Jourgeot ! s’extasia-t-elle, la bou-