Page:Louis Pergaud - Les Rustiques nouvelles villageoises, 1921.djvu/84

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reux la rouge purée septembrale, si douce aux cœurs douloureux et aux gosiers altérés.

Ainsi, le poète Étienne Lecourt, admirateur de Casimir Delavigne et auteur — peu goûté dans son pays, où nul n’est prophète — auteur, disons-nous des Échos du Cœur, tenait en haute et particulière estime le musicien Jacques Mirondeau, son aîné, lequel, heureux des seuls accords qu’il tirait de son violon, avait vécu libre et sans lois, comme son ami Étienne, jusqu’à quarante-cinq ans, âge auquel, par amour pour la musique, il avait épousé Mlle Euphrasie Jeannerot, de vingt ans plus vieille que lui, qui nourrissait pour l’harmonie le culte le plus fervent et passait devant son piano toutes les heures qu’elle ne consacrait pas à son ménage.

Le mariage n’atténua point la bonne affection qui unissait les deux hommes ; au contraire, et souventes fois, quand le musicien, pour une raison ou pour une autre, tardait plus que de coutume à descendre en ville, le poète montait faire au campagnard et à sa femme une visite d’amitié et de respect.

Ce jour-là, précisément, Étienne Lecourt, par le sentier abrupt, hérissé de rochers et bordé de déclivités dangereuses, qui serpente au flanc de la montagne, avait grimpé jusqu’à Cornabeuf et, Mme Mirondeau au piano, Jacques, l’archet en main, ils avaient passé tous trois un délicieux