Page:Louis d Elmont Hallucinations amoureuses 1924.djvu/30

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enchantement, l’électricité se ralluma, et la lumière vint éclairer subitement le lit conjugal.

Prosper jeta un regard complaisant sur la jeune femme…

Mais, immédiatement, il resta interdit… se frotta les yeux… puis regarda encore :

— Ce n’est pas possible !… Je deviens fou !… s’écria-t-il.

Il y avait de quoi, en effet, être stupéfait : la femme qui était couchée à côté du directeur, la femme à laquelle il avait prodigué ses caresses et ses preuves d’amour n’était pas « l’innocente et pure » Juliette…

Non… C’était Léontine !

Et les cheveux blonds que le mari enamouré comparait tout à l’heure à la soie la plus fine étaient les cheveux bruns, et aussi soyeux d’ailleurs, de Mme Vve Violet, née Briquet, qui regardait en souriant son amant.

Il bondit furieux, hors du lit :

— Vous allez m’expliquer, Madame, rugit-il, votre présence ici… dans cette chambre et dans cette maison.

Il alla vers la porte… Elle était verrouillée en dedans…

Cette constatation le remplit d’aise.

— Je ne sais pas comment tu es entrée, dit-il… mais tu ne sortiras pas sans me dénoncer tes complices et sans me dire ce qu’est devenue ma femme.

— Ta femme… mais n’est-ce pas moi ? dit le plus tranquillement du monde Léontine.

— Inutile de continuer à jouer la comédie…

— Quelle comédie, mon ami ? Ne suis-je pas ta petite Juliette comme tu le disais il n’y a qu’un instant… Et ne m’as-tu pas épousée hier à la mairie du viie arrondissement de Paris, ce matin à l’église Saint-François Xavier…

« Ne sommes-nous pas venus ensemble en auto pour passer notre lune de miel dans cette maison… ?

« Enfin ne m’as-tu pas, tout à l’heure, initiée à trois reprises successives au mystère de l’amour ?…

Le directeur était toujours devant la porte, en barrant l’accès et certain que nul ne pourrait ni entrer ni sortir sans sa permission.

— En voilà assez, dit-il, qu’avez-vous fait de cette malheureuse enfant ?

Et, ce disant, emporté par sa colère, il s’approcha menaçant du lit dans lequel reposait Léontine.

Mais il avait à peine fait quelques pas que la lumière s’éteignait à nouveau, le laissant au milieu de la pièce.

Il tendit l’oreille, prêt à bondir si quelque fantôme lui apparaissait, décidé à sauter sur l’intrus et à ne pas le lâcher.

Mais il n’entendit rien… pas le plus léger frottement… le silence était complet et l’obscurité absolue.