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Page:Louise Drevet - en diligence de Briançon à Grenoble, 1879.djvu/26

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— Allons, dit la dame à peu près rassurée, je vois que, à part la neige, nous n’avons pas de danger sérieux à redouter. Les petits dorment, je vais faire comme eux. Bonsoir, Messieurs !

Comme elle achevait, nous entendîmes sur la route une grosse voix qui disait :

— Six loups ! Vous dites six loups, Genevois ?

— Pas un de plus, pas un de moins, camarade ! Ah ! elle s’est bien conduite, la luronne !

On gravissait en ce moment une côte, je ne sais laquelle. Un voyageur de l’impériale, sorte de maquignon en blouse, plus chargé d’écus qu’aucun de nous, peut-être, jusques et y compris l’Anglais, avait quitté sa place aérienne et marchait un bout de chemin pour se dégourdir les jambes.

Tout en marchant, il causait avec le conducteur.

Il paraît que leur conversation roulait sur quelque sujet qui n’avait rien de bien lamentable, car leurs gros éclats de rire s’élevant en duos bruyants nous arrivaient francs et communicatifs. Ils parlaient assez haut, du reste, pour que nous ne perdissions rien de leur dialogue.

Voici ce que racontait le maquignon :

« — Je transportais du Bourg à Huez, un des villages les plus haut perchés du Mandement d’Oisans, comme vous savez, un fort chargement de vin. Six mules j’avais, qui chacune portaient leurs deux barriques, soit en tout six hectolitres ou, comme on dit chez nous, six charges. Cinq de mes mules sont de