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Page:Louise Drevet - en diligence de Briançon à Grenoble, 1879.djvu/41

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portière une tête velue. Les dames qui se trouvaient avec nous jettent des cris épouvantables. Moi, je mets la main à la poche ; j’en tire… mon porte-monnaie et je dépose un shelling dans la sébille que me tendait la bête savante.

« Tout s’expliqua. Un montreur de bêtes donnait en passant une représentation. Un de ses ours dansait une légère polka sur l’air que votre fameuse Thérèsa a mis à la mode :

Rien n’est sacré pour un sapeur !

Le danseur avait rassemblé autour de lui toute la population du village. Il nous fallut attendre un quart d’heure avant de pouvoir continuer notre chemin, que Martin et les admirateurs de sa danse avaient encombré… Vous voyez donc, Monsieur le Français, qu’une diligence peut être arrêtée par un ours…

— Farceur de goddem ! fit le négociant.

L’Anglais n’eut pas l’air d’entendre.

Pendant que l'insulaire faisait son petit récit, nous regardant tous d’un air railleur, la diligence continuait rapide son chemin, franchissant monts, cols et plaines. Enfin, elle s’arrêta. Autant que j'en pus juger

Aux premières lueurs de l’aube matinale,

nous étions sur une place entourée de hautes et belles maisons. Les voyageurs du coupé, ceux de l’impériale étaient descendus pour faire un peu de mouvement, sans doute ; je m’apprêtais à les imiter.