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D’ailleurs, ni des unes ni des autres il n’était question. La marraine Marie Beissière avait servi à la gisen la rôtie sucrée destinée à lui rendre les forces dépensées pour la mise au monde d’un homme, et celle-ci l’avait consommée jusqu’à la dernière miette ; comme l’avait dit l’heureux père, tout allait bien !

L’arrivée de maître Léonard Pouchot fit cesser comme par enchantement tous les bavardages. Les commères se pressèrent autour du lit de l’accouchée pour admirer les beaux et utiles présents apportés par le futur parrain. On complimenta celui-ci sur sa magnificence, celle-là sur sa bonne fortune, et l’on prit rendez-vous pour la cérémonie religieuse du baptême, la seule usitée à cette époque, et qui devait avoir lieu à vệpres, c’est-à-dire dans l’après-midi.

Dans l’après-midi, à l’heure fixée, chacun et chacune se trouvèrent prêts. Les plus beaux habits avaient été tirés des armoires ; vraiment, l’on n’eût pas cru, à voir tout ce monde souriant, en vêtements de fête, que l’on était à l’un des plus mauvais jours de cette mauvaise année 1709.

Deux à deux, parrain et marraine effectifs, parrain et marraine babillards, sage-femme et poupon enveloppé du paillassieu, père et proches parents, puis toute la série des amis et connaissances, descendirent joyeusement l’escalier d’aspect monumental, se répandirent dans la rue deux par deux, en procession — en rang d’oignons — comme disait plus pittoresquement qu’académiquement dame Grosbec. De la rue Chenoise, le cortège déboucha sur la place Notre-Dame. Les sons joyeux de la cloche les ayant devancés et annoncés, tous les gamins du quartier avaient pris l’éveil. Hàves, déguenillés, la misère sur le visage et