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demoiselle dort encore… ou bien Mademoiselle a la fièvre…

— Il ne te manquait plus que cela, ma pauvre fille, dit Mademoiselle Yolande avec un peu de compassion, tu n’étais que bête, et c’était ton droit ; te voilà maintenant devenue idiote.

Catherinette ne sachant ce que ce mot voulait dire, car dans son pays on appelait les idiots du nom charitable d’innocents, pensa bien cependant que ce n’était pas un compliment que la comtesse lui faisait. Pourtant elle se garda de répondre, faisant preuve en cela de plus de sens que sa pétulante maîtresse.

— Il paraît que te voilà aussi devenue muette ? fit Mademoiselle Yolande ; ce ne sera pas dommage.

— Oh ! que nenni, Mademoiselle, j’ai toujours ma langue, mais je ne comprends rien à ce que Mademoiselle me demande. Elle me parle d’une fête, d’une musique ; moi je ne sais pas où il y a eu une fête. Je n’ai point entendu jouer de musique…

— Comment, tu n’as rien su de la fête donnée au château ? tu n’as pas assisté au défilé des voitures ? tu n’as pas vu passer les invités dans la grande allée de marronniers ? c’est cependant un spectacle dont la domesticité ne se prive guère… tu n’as pas ouï parler de l’arrivée des enfants du marquis Jacques… ?

— Mais, Mademoiselle, je ne sais rien de rien de tout cela. Je n’ai pas quitté le château ou la manufacture, je ne suis pas descendue au bourg. Il n’y a pas eu de fête cette nuit au château, je vous l’assure ; le marquis Jacques est resté à la manufacture jusqu’à l’heure habituelle de son coucher, et son valet de chambre n’a pas eu de service extraordinaire cette nuit ; on l’aurait bien su…