Page:Louise drevet - Dauphiné bon coeur, 1876.djvu/69

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 63 —

belles fleurs dont le jardin était rempli, accablées par la chaleur, courbaient indolemment leurs tiges ; leurs parfums embaumaient l’air. Yolande en cueillit quelques-unes qu’elle arrangea en bouquet ; puis, se souvenant qu’il y avait longtemps qu’elle n’avait jeté du pain émietté aux cyprins dorés peuplant le bassin de marbre, d’où s’élevait une gerbe irisée de vingt pieds de hauteur, elle s’achemina vers la pièce d’eau ornant le milieu du jardin. Là, à sa grande surprise, elle vit que ses petits poissons familiers avaient des compagnons. Ces compagnons n’étaient autres que des canards ; de ces beaux canards huppés, de race hollandaise dont le plumage éclatant reflète avec tant de bonheur tous les jeux de la lumière. Ravie et oubliant ses récents mécomptes, elle s’assit sur un banc de pierre sculpté, qu’on avait placé là exprès pour elle et s’amusa à diviser en morceaux très-menus un gâteau qu’elle avait mis en réserve à son déjeuner pour le repas de ses poissons. Elle jetait à mesure ces morceaux dans le bassin. — Can ! can ! can ! can ! faisaient, en s’emparant de la succulente prébende, les gloutons canards. Les cyprins, frustrés dans leurs droits par le voisinage des voraces volatiles, parvenaient à peine à attraper de ci de là quelques miettes. Les efforts qu’ils faisaient pour saisir les fragments du gâteau, les luttes d’adresse qu’ils avaient à soutenir, tout cela amusait fort Yolande qui aurait bien voulu faire quelqu’un témoin de son contentement, ce quelqu’un ne fut-il que Catherinette.

Mais Catherinette, restée à la fabrique, ne revenait pas. Décidément, la solitude n’est pas toujours chose agréable.

Soudain, Yolande poussa un cri terrible. Il n’y a