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pas de bonheur parfait sur la terre. Son contentement avait été court. Tandis qu’elle jouait avec les cyprins et avec les canards, un serpent, rampant sur l’herbe, était parvenu jusqu’à elle et, subtil, insinuant, s’enlaçait autour de son cou comme un collier. Elle frissonnait à ce contact glacé ; elle frémissait de tout son corps au sifflement aigu qui déchirait ses oreilles, et pourtant restait raide, sans mouvement, comme déjà glacée par la mort.

Mais elle n’était plus seule : à son premier cri, Victor-Louis, qu’elle ne voyait pas, mais qui ne la quittait guère plus que son ombre, était accouru, et d’une main ferme s’était emparé du reptile, qu’il rejeta au loin avec un geste d’horreur. Le serpent s’en alla tomber inerte dans le bassin, au milieu des canards et des cyprins épouvantés.

— Vous n’avez pas de mal, Mademoiselle ? demandait anxieusement Victor-Louis à Yolande, qui revenait assez vite de son émotion. Ce serpent…

— Non, je ne crois pas avoir été blessée, répondit Yolande, qui tremblait encore un peu et dégageait sa main, que Victor-Louis oubliait d’abandonner. C’est affreux d’être exposée à des rencontres pareilles. On aurait dû me dire qu’il y avait du danger à se promener dans ces jardins.

— Les serpents de ce pays sont en général des couleuvres inoffensives, dont la morsure n’est pas dangereuse. Je vais me mettre à la recherche de celui qui vous a effrayée. Et, tenez, Mademoiselle, le voilà là-bas, sans mouvement… il n’est plus à craindre.

— Ah ! mais, continua-t-il en réprimant avec peine un franc rire, je crois reconnaître l’espèce à laquelle appartient cet ophidien. C’est un aspic basilic, un rep-