Page:Loviot - Les pirates chinois, 1860.djvu/173

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brillant et splendide ; les pirates vinrent à la première heure, à notre grand étonnement, enlever tout à fait notre panneau. Ils paraissaient joyeux et semblaient vouloir nous être agréables comme à des amis qu’une circonstance fâcheuse aurait forcé de négliger un moment. L’heure du déjeuner venue, ils nous apportèrent à manger avec plus d’abondance qu’ils ne l’avaient fait jusqu’alors et nous offrirent du vin. Cette boisson est faite avec du riz fermenté ; elle est claire comme de l’eau, et possède un petit goût suret qui rappelle un peu le vin nouveau de France.

Comme la jonque marchait vue d’une côte déserte, les pirates n’avaient aucune crainte relativement à nos personnes. Ils laissèrent donc, pour la première fois, notre cellule ouverte tout le jour ; ils engagèrent Than-Sing à monter sur le pont, et cela avec une affabilité qui nous surprenait. Aussi, malgré la frayeur, la répulsion que m’inspiraient ces hommes, j’avais envie de le suivre. J’avais tant souffert pendant ces deux jours qu’ils m’avaient tenus sous le séquestre, que c’était pour moi un bonheur plein d’ivresse, de pouvoir jouir librement des rayons du soleil. Mon sang se vivifiait peu à peu ; je me sen-