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trière, où chacun le considérait comme un patriarche respecté, il laissait libéralement à chacun l’indépendance des convictions et des actions. Il n’avait pas l’ombre de ce personnalisme tout absorbant qui se développe d’ordinaire chez ceux qui atteignent une situation aussi élevée par leurs propres efforts.

Dans son enseignement, M. Charcot se montrait l’ennemi de toute espèce d’hypothèses et de théories. Dans ses recherches, il ne se permettait point de quitter le terrain de la réalité et se bornait modestement à « enregistrer les faits » tout en indiquant les liens qui les unissaient à d’autres antérieurement connus et acquis, évitant les explications théoriques et l’entraînante hypothèse. C’est pourquoi ses cours étaient d’une compréhension facile, même pour les non-spécialistes. Ils offraient ainsi une différence frappante, on pourrait même dire l’opposé des cours des cliniciens allemands. Avec quelle tension d’esprit, quel pénible effort fallait-il suivre les conférences germaniques, particulièrement lorsqu’il s’agissait des fonctions supérieures et complexes du cerveau ! Je me rappelle, entre autres, le professeur Meynert, de Vienne, pour lequel je professe la plus grande estime. Son cours exerçait une influence accablante sur l’esprit et sur l’âme de ses auditeurs. En quittant la salle des conférences, on se sentait brisé, l’intelligence endolorie, et on emportait la conviction affligeante que l’étude d’une spécialité ne s’obtient qu’à la sueur du