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Tunis

escalier qui s’enfonce vers des profondeurs insoupçonnées. Descente de cet escalier. Au bas des marches s’ouvre une caverne. Dans la caverne un amas, une montagne de pièces d’or. Deux nègres nus, brandissant une épée de feu, gardent le trésor.

— Je puis faire disparaître ces nègres, dit le Marocain. Mais il me faut trois jours de prières et d’incantations, et des encens coûteux. Il est juste aussi de me payer mes peines. Si vous avez de l’argent, donnez-le ! Dans trois jours le trésor est à vous.

Les Maltais, on s’en doute, donnent avec empressement leurs économies. Les trois jours se passent. De Marocain, point. Sous le lit, plus de dalle et plus d’anneau. Une semaine… Un mois… Toujours rien.

Et voici venir enfin l’heure du procès, si, par chance, on a pu mettre la main sur le sorcier, sur le puissant hypnotiseur qui peut faire voir à ses dupes tout ce qu’il lui plaît de leur faire voir.

Pour en finir avec la vie des rues :

À l’époque où nous y vivions, l’Islam de Tunis possédait deux marabouts que j’ai vus bien des fois de mes yeux stupéfaits.

Les marabouts représentent, pour les musulmans, des sortes de saints. Les uns, fort lucides, ne sont que particulièrement pieux. D’autres sont ou des idiots ou des fous, et leurs bizarreries se voient considérées comme un mystérieux souffle d’Allah. D’où l’immense respect dont on les entoure.

Les deux dont je parle exerçaient, chacun dans son rayon, une très grande influence religieuse sur le menu peuple. L’un habitait la rue du Pacha, l’autre une rue dont j’oublie le nom.

Celui de la rue du Pacha logeait dans une sorte d’armoire ménagée à même la muraille, quelque chose qui ressemblait assez au lit clos des Bretons.

Dos heures entières il y restait enfermé, parfaitement