Page:Lucien - Œuvres complètes, trad. Talbot, tome I, 1866.djvu/373

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roi présente une couronne à la jeune mariée ; près de lui, comme paranymphe, se tient Héphestion, une torche allumée dans la main, et appuyé sur un beau jeune homme, que je crois être l’Hyménée, son nom n’étant point écrit. Dans une autre partie du tableau, sont des Amours qui jouent avec les armes d’Alexandre : deux d’entre eux portent sa lance, comme un lourd fardeau, et paraissent accablés spus le poids d’un ais ; deux autres traînent par les courroies le bouclier, sur lequel est assis un troisième, qui a l’air d’un souverain sur son char ; un dernier s’est glissé sous la cuirasse qui gît à terre, et il semble épier les autres, pour leur faire peur, quand ils passeront près de lui[1].

6. Ces épisodes ne sont point des hors-d’œuvre, et Aétion ne les a pas placés sans dessein dans son tableau ; mais ils rappellent les goûts guerriers d’Alexandre, qui, malgré sa passion pour Roxane, n’a point oublié celle des armes. D’ailleurs, on peut dire que cette toile respire comme un air nuptial, puisqu’elle fit donner pour épouse à l’artiste la fille de Proxénide ; de telle sorte qu’Aétion ne s’en retourna qu’après avoir célébré un mariage qui fut, pour ainsi dire, la suite de celui d’Alexandre. Le roi servit de paranymphe au peintre, et le prix d’un mariage en peinture fut un véritable hymen.

7. Hérodote, pour revenir à lui, pensait donc que l’assemblée des jeux olympiques était capable de donner la réputation de bon historien à celui qui viendrait y raconter aux Grecs les victoires de la Grèce, et c’est ce qu’il fit. Pour moi… mais, au nom du dieu des amis, n’allez pas croire que je sois assez fou pour comparer mes écrits aux siens ; que ce grand homme me le pardonne ! je veux dire simplement que je suis placé dans la même situation que lui. La première fois que je vins en Macédoine, je réfléchis à la conduite que je devais tenir. Je désirais montrer qui j’étais au plus grand nombre des Macédoniens, et leur faire connaître mes ouvrages ; mais il me semblait fort peu commode de parcourir toutes les villes dans l’espace d’une année. Je pensai donc que je ferais mieux d’attendre quelque assemblee générale, de m’y présenter et d’y réciter quelque discours, espérant voir par là tous mes souhaits accomplis.

8. Vous êtes venus : j’ai devant moi l’élite de chaque cité, la fleur de la Macédoine. Nous sommes dans l’enceinte d’une grande

  1. Ce tableau nous semble décrit avec une finesse de style qui a toute la suavité de pinceau d’un grand maître. On croit lire l’analyse d’une toile de l’Albane.