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DE LA NATURE DES CHOSES

Vois du large émerger ces monts : l’éloignement
Les groupe, en fait une île, apparente barrière ;
Mais la mer ouvre entre eux une vaste carrière
Où des flottes de front manœuvrent librement.

Quand l’enfant qui tournait s’arrête brusquement,
Longtemps autour de lui l’atrium tourbillonne,
Et, voyant se presser colonne sur colonne,
Il croit, ou peu s’en faut, que le toit sans appui
Vacille menaçant et va crouler sur lui.

Quand la Nature lève au-dessus des montagnes
Son grand flambeau tremblant qui rougit les campagnes.
L’astre sur les sommets paraît se reposer ;
420Il les touche, il les baigne, il va les embraser.
Où donc sont-ils ces monts dont le soleil s’élance ?
À deux mille traits d’arc, à cinq cents jets de lance ;
Entre eux et le soleil l’immensité des mers
Va se développant sous l’infini des airs ;
Des milliers de pays lointains sortent de l’ombre,
Pleins de peuples divers et d’animaux sans nombre ?

Le plus mince amas d’eau, moins d’un travers de main.
Flaque infime arrêtée aux pierres du chemin,
Livre aux yeux sous nos pieds des profondeurs égales
Au gouffre ouvert du sol aux voûtes sidérales ;
Et sous la terre on voit les nuages, les cieux
Et les joyaux cachés de l’écrin radieux.

Quand ton cheval robuste en plein courant s’arrête,