J’obtienne de ta main la gloire et la couronne !
Le ciel est ébranlé quand la foudre résonne,
Parce que dans les airs les nuages mouvants
S’entrechoquent, poussés par la lutte des vents.
Jamais le bruit ne part d’une région pure ;
C’est dans l’ombre où s’amasse une mêlée obscure
Que l’orageux tumulte enfle sa grande voix.
Le nuage n’est pas dense autant que le bois
Et la pierre ; il n’a point la trame inconsistante
Qui forme la fumée et la brume flottante.
Car ou bien, comme un bloc par son poids entraîné,
Il tomberait ; ou bien, dans l’air disséminé,
Il ne retiendrait guère en son tissu trop frêle
L’eau figée en flocons et congelée en grêle.
On l’entend murmurer sur l’abîme des cieux,
Comme font, au-dessus des cirques spacieux,
Tendus entre les mâts et les poutres, ces voiles
Dont l’Eurus furieux, en déchirant leurs toiles,
Tire un claquement sec de parchemin fendu ;
Ou comme un vêtement qui flotte suspendu
Et se plaint sous le fouet du vent qui le moleste.
Ainsi craquent les plis de ce manteau céleste.
Parfois d’un vol contraire emportés, ces grands corps,
Sans se heurter de front se rasent bords à bords.
Le bruit qu’entre leurs flancs le frottement éveille
Est sec et se propage, exaspérant l’oreille,
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LIVRE SIXIÈME