Page:Luzel - Contes populaires, volume 3, 1887.djvu/167

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étaient un peu échauffées, et l’on parlait beaucoup et fort. Rio monta à sa chambre, avec le compagnon de lit que la châtelaine elle-même lui désigna, et qui n’était pas de ceux qui avaient bu le moins. Aussi, se mit-il promptement au lit, et, quelques minutes après, il ronflait comme un tuyau d’orgue. Rio se coucha aussi, sur le devant du lit, et faillit s’endormir aussitôt. Heureusement qu’il se rappela à temps les recommandations du chat. Il changea de place avec son compagnon de lit, sans l’éveiller (il dormait comme un rocher), le tira sur le devant, prit sa place du côté du mur, puis il souffla la lumière, et feignit de dormir et de ronfler aussi.

Tôt après, il entendit ouvrir la porte de la chambre, avec précaution, et il vit la châtelaine, sa maîtresse, entrer et s’avancer vers le lit, sur la pointe du pied, tenant d’une main un chandelier, et de l’autre un grand coutelas de chasse. Quand elle fut contre le lit, sans hésiter un seul instant, elle trancha la tête au dormeur qui était sur le devant, pensant que c’était Rio, la laissa rouler sur le plancher et la poussa du pied, en s’en allant, et ferma la porte, à double tour.

Voilà Rio fort embarrassé, comme bien vous pensez. Il songea à s’enfuir, par une fenêtre, par la porte, ou par telle autre issue qu’il trouverait.