Page:Luzel - Contes populaires, volume 3, 1887.djvu/344

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Le lendemain, Fanch de Kerbrinic et Petit-Jean se levèrent, de bonne heure, et firent leurs préparatifs de départ. Au moment où ils montaient à cheval, la vieille dame vint à eux, tenant d’une main une fiole, et, de l’autre, deux verres, sur un plat. Elle s’approcha de son fils et lui dit :

— Puisque tu restes sourd aux conseils de ta mère et persistes à vouloir la quitter, accepte encore d’elle un peu de cette liqueur généreuse, qu’elle a préparée elle-même, et qui te soutiendra dans le périlleux voyage que tu vas entreprendre.

Et elle lui versa du poison préparé par la vieille sorcière, et en présenta également à Petit-Jean ; puis elle baissa les yeux vers la terre et fit mine de pleurer. Petit-Jean, ayant remarqué l’aspect étrange de la liqueur, flaira une trahison, et il dit doucement à son compagnon, dont le cheval touchait le sien :

— Ne buvez pas ! faites semblant de boire seulement, et laissez la liqueur tomber dans l’oreille de votre cheval.

Ils vidèrent tous les deux leurs verres dans les oreilles de leurs chevaux, sans que la vieille s’en aperçût, puis ils partirent, au galop.

— Au revoir, mon fils, et bonne chance ! dit la dame de Kerbrinic, tout en s’étonnant qu’ils