Page:Luzel - Légendes chrétiennes, volume 1, 1881.djvu/286

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— Ensuite j’ai vu une autre fontaine, une fontaine de lait, ce que je n’avais jamais vu encore.

— Et vous en avez encore bu ?

— Oui, j’ai bu à celle-là aussi.

— Et après ?

— Après, j’ai vu une troisième fontaine, une fontaine de vin rouge, cette fois.

— Et vous en avez bu, comme des autres ?

— Non, je n’ai pas bu à celle-là.

— Vous y avez bu, et vous vous êtes enivré, et vous n’avez pas suivi plus loin votre troupeau. Vous êtes un mauvais berger, et vous avez menti. Vous vous rappelez nos conditions ? Vous pouvez donc vous en aller ; je n’ai pas besoin de vous, et je ne vous dois rien.

Et il lui fallut partir, sans le sou. Il revint vers ses frères, dans un état fort piteux, et leur raconta ce qui lui était arrivé.

— Eh bien ! moi, je veux voyager aussi, — dit alors le second frère, qui s’appelait Yves, — et j’espère ne pas m’en retourner dans un aussi piteux état.

Et il partit, et ne fut pas plus heureux que son aîné. Il lui arriva absolument comme à celui-ci. Il rencontra le même vieillard, alla avec lui à son château, but aux trois fontaines, s’enivra à la fontaine de vin rouge, mentit et fut aussi renvoyé, sans le sou.