Page:Luzel - Légendes chrétiennes, volume 2, 1881.djvu/250

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je veux y aller aujourd’hui, et Jean et Jeanne viendront avec moi. Mettez donc vos habits du dimanche, mes enfants, et disposez-vous à me suivre.

La mère était à carder de l’étoupe, pour filer, et elle ne pouvait retenir ses larmes. Jeanne remplit ses poches d’étoupe, sans qu’elle s’en aperçût, et ils partirent tous les trois. Quand ils furent dans le bois, qui était très-grand, Jeanne, qui marchait derrière son père et son frère, accrochait des flocons d’étoupe aux buissons, partout où ils passaient.

La nuit vint qu’ils étaient encore dans le bois, et le père dit alors :

— Hélas ! mes pauvres enfants, nous nous sommes égarés, et il faudra passer la nuit ici. Ils s’étendirent tous les trois sur la mousse, au pied d’un grand arbre. Jean, qui était fatigué, s’endormit aussitôt. Jeanne fit semblant de dormir aussi ; mais elle ne dormit pourtant pas. Quand le père crut ses deux enfants bien endormis, il se leva tout doucement et partit. Jeanne l’entendit bien se lever et s’en aller ; mais elle feignit de dormir toujours.

Au matin, quand Jean s’éveilla et qu’il vit que son père n’était plus auprès de lui, il se mit à pleurer.

— Tais-toi, mon frère, lui dit Jeanne, et ne