Page:Luzel - Veillées bretonnes, Mauger, 1879.djvu/106

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Même silence ; et il disparut, au détour du chemin.

Au même instant, j’entendis le galop d’un cheval, qui arrivait à fond de train. Et, avec la rapidité de l’éclair, passa sous mes yeux un cavalier inconnu, la tête couverte d’un large feutre noir, enveloppé d’un manteau qui flottait au vent et monté sur un cheval noir qui, de ses quatre pieds faisait jaillir les étincelles des cailloux du chemin. Il était déjà loin de moi que j’entendais encore son galop sur la route glacée et sur le pavé du Vieux-Marché. Puis, tout rentra dans le silence.

Ce cavalier me préoccupait beaucoup, et je me tourmentais l’esprit pour savoir qui ce pouvait être. Il avait passé avec une telle rapidité, que je n’avais pu ni voir sa figure, ni lui adresser la parole. Je ne connaissais pas davantage le cheval. Quel magnifique cheval ! Jusqu’alors, je n’avais pas eu grand’peur, et je n’avais songé à rien de surnaturel. Mais, en réfléchissant, dans le silence, à tout ce que je venais de voir et d’entendre, insensiblement, je fus pris d’une telle frayeur, que j’étais comme pétrifié et n’avais aucun sentiment de rien. Comme presque toujours je n’eus peur qu’après.

— Et avant aussi, dit Ewenn, ne l’as-tu pas dit ?

— C’est vrai, j’avais eu peur avant aussi, avant d’avoir rien vu ni entendu, ce qui me semble étrange. Je ne saurais dire combien de temps je restai dans cet état. Mais, un coq