Page:Luzel - Veillées bretonnes, Mauger, 1879.djvu/107

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chanta, dans le voisinage, et aussitôt je n’eus plus peur, et je me remis en route et j’arrivai à Guergarellou, au petit jour.

— J’ai souvent fait cette remarque, à propos de pareilles histoires, dit Francès : c’est que le chant du coq, ou le son d’une voix connue vous remet et vous rassure immédiatement, au moment de la plus grande frayeur. On dirait que notre âme voyage loin de nous, et que le corps, resté seul, a peur et tremble, comme un enfant abandonné dans les ténèbres. Mais au moindre bruit, à la moindre manifestation de la vie extérieure, elle revient promptement, et nous n’avons plus peur, parce que nous ne nous sentons plus seuls.

— En arrivant à Guergarellou, reprit Pipi, je me couchai aussitôt. J’eus un peu de fièvre, je ne le cache pas, et je dormis peu. Je me levai vers le soir, et je racontai ce qui m’était arrivé. Ce fut alors seulement que mon frère le notaire parla aussi de la clochette invisible qui l’avait suivi, à travers champs, jusqu’à Guergarellou.

Eh ! bien, maintenant, les esprits forts, les incrédules systématiques auront beau vouloir m’expliquer tout cela par leurs mots ordinaires : rêve, hallucination, trouble des sens… je réponds, moi, qu’il y a autre chose que cela, qui échappe à notre raison comme à leur science, mais qu’il m’est impossible de nier pour cela.

— J’aime ta franchise, et quoique, dans l’opinion