Page:Luzel - Veillées bretonnes, Mauger, 1879.djvu/132

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renonçant à monter plus haut, il s’en retournera, comme le premier. Enfin, viendra un beau carrosse, attelé de deux chevaux superbes. Le cocher te priera, le plus poliment du monde, de descendre et d’entrer dans ce carrosse que t’envoie son maître. Tu lui répondras, comme aux deux autres, que tu es prêt à le suivre, mais, qu’il faut qu’il vienne te prendre sur ton rocher. Il montera jusqu’à la troisième marche ; mais, ne pouvant aller plus loin, il s’en retournera aussi avec son carrosse, en poussant des cris épouvantables. Alors, tu seras sauvé. Tu pourras descendre de ton rocher. Tu me retrouveras sur le rivage, où je resterai en prière, jusqu’à ton retour. Fais exactement tout ce que je viens de te dire, aie confiance en Dieu, qui sera avec toi, et tu délivreras ainsi ton père de la damnation éternelle.

Mabik prit de l’eau bénite et se signa, comme doit le faire tout bon chrétien en se mettant en voyage, puis il se dirigea vers le rivage de la mer, accompagné de son oncle l’ermite qui, dans le trajet, lui faisait répéter ses recommandations, pour qu’il n’oubliât rien. Ils s’embrassèrent, avant de se quitter, puis le jeune homme (il avait à présent 17 ans) monta sur la barque et se dirigea vers le fatal rocher, pendant que le vieillard, à genoux sur la grève, priait, les mains jointes, les yeux tournés vers le ciel, immobile comme une statue de pierre.

Mabik arrive au rocher ; il en fait trois fois le tour, en traçant trois cercles à sa base, avec