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Page:Luzel - Veillées bretonnes, Mauger, 1879.djvu/145

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dit Gorvel, et je n’ai rien ajouté de mon cru.

— Je le crois, puisque vous l’affirmez, répondit Francès ; mais, c’est une habitude très-répandue parmi les conteurs que de coudre ainsi bout à bout, — et sans beaucoup d’art, ordinairement, — des épisodes empruntés à différentes fables, pour allonger le récit et le rendre plus émouvant. Par exemple, l’épisode de la jeune princesse que le héros délivre d’un serpent ou dragon à sept têtes, en tuant le monstre, est un de ceux dont on abuse le plus, et il est des conteurs qui trouvent moyen de l’introduire dans presque tous leurs récits.

— Qu’est-ce qu’un corps sans âme ? demanda le petit pâtre Ar Gwenedour.

— Un corps sans âme, lui répondit Francès, est un Être, un monstre dont la vie ne réside pas dans son corps, et qui ne peut être tué qu’en l’attaquant dans le lieu même où elle se trouve, ce qui n’est pas facile à découvrir. Vous avez vu que la vie du géant Pharaûs résidait dans la racine d’un arbre de buis. Qui se serait jamais avisé de l’aller chercher là ? Dans d’autres contes du même type, que j’ai entendu conter, la vie du monstre se trouve dans un œuf, lequel œuf est renfermé dans un canard ou un pigeon ; le pigeon ou le canard, dans un lièvre ; le lièvre, dans un loup ; le loup, dans un lion, et enfin le lion, dans un coffre cerclé de fer, au fond de la mer, ou sous les racines d’un vieux chêne,