Page:Luzel - Veillées bretonnes, Mauger, 1879.djvu/58

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aux revenants ; ils les appelaient ignorants et superstitieux, si je me rappelle bien, et disaient que cela n’avait pas le sens commun. Et vous-même, Francès, qui avez voyagé et étudié, vous qui savez le latin, qui est, dit-on, la langue des sorciers et des magiciens, et qui sans doute avez un peu fourré le nez dans leurs livres, je gagerais bien que vous êtes de mon avis, et que vous ne croyez pas un mot de toutes ces balivernes ?

— Votre question m’embarrasse un peu, Ann Drane ; je crois volontiers votre recteur, votre maître d’école et votre maire aussi gens savants et très-sensés, sans me regarder pour cela obligé de partager leur manière de voir sur ce sujet, et je ne saurais être aussi absolu et aussi tranchant que vous et eux, dans une matière si sérieuse et si délicate. Si je vois de grands noms et de grandes autorités contre, je vois aussi de grandes raisons et de respectables témoignages pour. Je vous répondrai un peu comme Fanch Ar Floc’h. : Il est dans ce monde bien des choses que ne peuvent comprendre m’ expliquer notre raison et toute notre science, et Dieu est grand ! Et puis encore, je crois que notre monde visible et tangible, celui qui tombe sous la perception de nos sens, et dont la raison et la science de l’homme se rendent compte, plus ou moins bien, est comme enveloppé d’un autre monde, imperceptible et immatériel, où tout est mystères pour nous, et dont nous avons parfois de