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Page:Luzel - Veillées bretonnes, Mauger, 1879.djvu/79

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les tables, sous les lits, dans les lits, plus mortes que vives.

La mère supérieure sortit, avec trois ou quatre des plus anciennes religieuses, portant des flambeaux, et elles se dirigèrent vers l’ossuaire, en récitant des prières. Mais, à mesure qu’on approchait avec les flambeaux, les fantastiques lumières s’éteignaient, et quand on s’éloignait, elles reparaissaient encore. Enfin, la mère supérieure prit une résolution héroïque, et, tenant son chapelet d’une main, un buis sacré trempé dans de l’eau bénite, de l’autre main, elle s’approcha, en aspergeant l’ossuaire, avança la tête entre les balustres de pierre, pour voir dans l’intérieur, et vit… que l’on avait jeté parmi les ossements des morceaux de bois pourri. Soupçonnant alors que ce bois pourri devait être la cause de ces mystérieuses lumières, elle en prit un morceau, le posa à terre, puis s’en éloignant avec son flambeau, elle vit qu’il brillait et luisait dans l’obscurité, et dès lors tout fut expliqué.

Cette explication nous parut cependant peu concluante, et plus d’une d’entre nous ne dormit pas de la nuit, ou ne vit, dans ses rêves, que morts et squelettes qui la poursuivaient. Pendant plusieurs jours, nous ne passâmes devant l’ossuaire qu’en tremblant, et en y lançant à la dérobée des regards de terreur et de défiance ; puis, on en rit, et enfin on n’y pensa plus.